Auteur/autrice : Ulysse Delerm
Du 23 au 29 novembre, les directeur·ices de Centres de Ressources Politique de la Ville (CRPV) et le coordinateur national du Réseau national des centres de ressources politique de la ville (RNCRPV) étaient en visite à Mayotte à l’invitation du GIP CRPV-CS Maoré Ouvoimoja.
Un an après le passage destructeur du cyclone Chido et de la tempête Dikeledi sur le territoire, et dans un contexte législatif marqué par l’adoption de la loi d’urgence pour Mayotte en février et la loi de programmation pour la refondation de Mayotte en août, il était important pour le RNCRPV de mieux appréhender les réalités de la politique de la ville à Mayotte et les défis du passage en 100% quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV).
Concrètement, cette volonté s’est traduite en un programme de travail riche : réunions des directeur·ices de CRPV, échanges avec l’équipe du GIP CRPV-CS Maoré Ouvoimoja, rencontre de Combo Abdallah Combo, sociologue et directeur de l’Autonomie et des Prestations Sociales au conseil départemental de Mayotte et d’Hamada-Hamidou Sidi, directeur de la politique de la ville à Mamoudzou, séminaire de travail avec les professionnel·les mahorais·es de la politique de la ville, visites des QPV de Kawéni (commune de Mamoudzou) et d’Iloni (commune de Dembéni), découverte des opérations de l’Établissement Public de Reconstruction et de Développement de Mayotte (EPRD Mayotte) sur la ZAC Tsararano-Dembéni (commune de Dembéni).
Suite aux échanges avec les professionnel·les mahorais·es, le RNCRPV souhaite attirer l’attention sur les points suivants :
- des écarts persistent entre Mayotte et le reste du territoire en matière de droit commun, notamment concernant l’accès aux droits, accès à la santé, scolarisation, etc. ;
- le financement de la politique de la ville à Mayotte demeure très inférieur à la moyenne nationale. À l’échelle régionale et pour tout le territoire national, cette moyenne se situe à 90 € par habitant·e au titre des crédits de la politique de la ville. À Mayotte, ce montant se limite à 39 € par habitant·e. Cette différence a un impact direct sur la capacité d’action des acteurs locaux. Cet écart met en lumière un enjeu majeur d’équité territoriale dans un département confronté à des besoins sociaux, économiques et urbains considérablement plus élevés que la moyenne nationale.
- le manque de visibilité sur les moyens alloués suite à l’adoption des lois dites “lois Mayotte”, et notamment dans le domaine de la politique de la ville : quelle évolution des crédits suite à la nouvelle géographie prioritaire consacrée par l’article 40 de la loi de programmation pour la refondation de Mayotte, qualifiant chaque commune comme un QPV ? En l’absence de revalorisation, les crédits du programme 147 à Mayotte chuteraient à 20,6 € par habitant·e, soit une division par deux, creusant encore davantage l’écart avec le reste du territoire national.
- les moyens du GIP CRPV-CS Maoré Ouvoimoja restent insuffisants, – comme tous les CRPV ultramarins son fonctionnement repose sur un mode de calcul spécifique de la part fixe de financement, structurellement plus faible que les CRPV hexagonaux. Le RNCRPV souhaite voir cette anomalie corrigée dans le cadre de l’actualisation du cadre de référence des CRPV. En outre, le GIP CRPV-CS Maoré Ouvoimoja pâtit également d’un manque de visibilité sur son fonctionnement futur notamment quant aux moyens financiers qui lui seront attribués dans le contexte de l’évolution de la géographie prioritaire.
Malgré ce constat très inquiétant, les directeur·ices peuvent aussi témoigner que Mayotte est un territoire riche de nombreuses ressources : élu·es engagé·es, professionnel·les de l’Etat et des collectivités mobilisé·es, monde associatif bien ancré dans les QPV, ingénierie sur place renforcée via l’EPRD Mayotte, potentiel de développement important notamment par les richesses naturelles à préserver…
Fort de ces atouts et dans un contexte de rapide évolution de la politique de la ville à Mayotte, ce territoire devra être suivi de près : laboratoire de l’articulation entre droit commun et politique de la ville, le reste du territoire national a et aura beaucoup à apprendre de Mayotte.
📰 En lire plus sur la venue du RNCRPV dans Le Journal de Mayotte
Les 10e rencontres nationales des centres de ressources politique de la ville ont été l’occasion pour l’ANCT de partager les chiffres clefs de l’activité cumulée des 19 CRPV en 2024.
Avec près de 88 ETP, les CRPV ont déployé 2 573 demi-journées d’activité (groupes de travail, qualification, formation, animation de réseaux…) qui ont touché 30 103 participant·es. 715 publications ont également été réalisées.
Cette activité « socle » des CRPV est soutenue à 57% par l’Etat.
Un zoom sur la fonction « ressources » des CRPV a également été rendu public à cette occasion. Cette étude rend compte de la manière dont les activités de veille, de capitalisation, de valorisation et de transferts de connaissances sont traitées par les CRPV – et comment ce traitement a évolué au côté des pratiques des publics cibles.
Consultez l’étude sur La Grande équipe
Cibles :
- Acteurs de le la Politique de la ville
- Acteurs de l’emploi (SPE, associations)
- Employeurs (associations, collectivités, entreprises)
- Structures du droit privé (entreprises et associations) qui forment et accompagnent sur les discriminations
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Le Réseau des Centres de Ressources Politique de la Ville organise deux webinaires sur le thème des discriminations et du recrutement.
Depuis plus de 10 ans, le monde du travail a vu progressivement la mise en place de mesures visant à lutter contre les discriminations ou à promouvoir la diversité. Ces dynamiques portent à la fois sur la mise en œuvre de politiques de diversité, de lutte contre les discriminations et/ou de promotion de l’égalité, et sur les métiers des acteurs qui incarnent ces démarches.
A situation égale, les habitants des quartiers sont plus exposés au chômage ou à des difficultés d’insertion, avec des inégalités persistantes. Toutefois, le critère unique de résidence en QPV ne suffit pas à expliquer les inégalités d’accès et de maintien dans l’emploi.
De nombreux travaux montrent (Enquête Toluna et Harris, 2023 ; Baromètres des discriminations dans l’emploi de la Défenseure des droits) que les discriminations sont prégnantes, avec un ressenti particulièrement fort dans l’accès à l’emploi et le maintien en poste.
Les conséquences sont multiples sur les personnes concernées : impact sur la santé mentale, accès réduit à d’autres droits comme le logement, maintien dans des situations précaires… Il apparaît essentiel de considérer les discriminations comme un frein réel à l’emploi, d’autant plus que les QPV concentrent une part importante de populations minoritaires.
Le testing est un outil qui permet de mesurer et de rendre visibles les discriminations, notamment de candidatures à un poste. Quels en sont les apports ? Quelles utilisations et quelles limites ? Comment l’articuler avec d’autres outils pour objectiver les discriminations ?
Une fois les discriminations mises en évidence, comment agir dessus, et comment impliquer les acteur·trices du territoire ?
Pour explorer ce sujet, nous vous proposons deux webinaires :
Webinaire 1 : Sensibilisation et formation des recruteurs aux discriminations
Vendredi 12 septembre 2025 de 10h à 11h30
Ce premier webinaire sera l’occasion de dresser un constat des discriminations à partir de l’étude conduite par l’INJEP et Yannick L’HORTY sur les “Discriminations à l’embauche : la sensibilisation des recruteurs en question”.
Après la présentation des enseignements de ses travaux, nous nous interrogerons sur les enjeux pour les recruteurs et explorerons la manière de piloter les politiques de diversité et de lutte contre les discriminations auprès des employeurs pour aller au-delà de la sensibilisation.
Avec la participation de :
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- Yannick L’HORTY, Directeur de TEPP-CNRS, directeur de l’ONDES
- Chloé TORCOL, Cheffe de projets et relation adhérents à l’Association Française des managers de la diversité (AFMD)
- Thomas SUZAN, Directeur des Ressources Humaines du groupe VITTORI
Webinaire 2 : Discrimination et recrutement : Comment agir concrètement ?
14 Novembre 2025 de 13h30 à 15h
Ce second webinaire sera l’occasion d’explorer des approches complémentaires pour former aux discriminations et avoir une approche systémique sur son territoire.
3 témoignages issus d’une collectivité, d’un réseau de missions locales et un projet local porté par le centre ressources politique de la ville IREV et le CARIF OREF des Hauts de France nous interrogerons sur la manière d’agir auprès des employeurs, et des demandeurs d’emploi. Quelles coopérations, quelles méthodes pour former, sensibiliser sur les discriminations à l’embauche et dans l’emploi ? Comment développer une approche systémique ?
Avec la participation de :
- Nathalie ROBERT – Association Régionale des Missions Locales SUD PACA
- Juliette GRIFFOND et Nabila PATEL (délégation égalité et citoyenneté) – et le Service emploi et formation (sous réserve), Conseil Départemental de Seine-Saint-Denis CD93
- Ingrid DEQUIN – IREV
Inscription ici
Le tissu associatif occupe une place essentielle sur les territoires, et singulièrement dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV). Les associations, via leur ancrage et leur nature démocratique et collective, agissent avec et pour les habitant·es des quartiers.
Pour autant et malgré ce rôle essentiel, les associations subissent d’importantes baisses de financement. Là encore, les associations en QPV sont durement touchées, alors même que comme l’objectivait l’Observatoire National de la Politique de la Ville en 2023, « le programme 147 octroie des subventions au montant unitaire souvent faible, mais qui représentent une part importante des ressources totales des associations ».
Le constat est donc alarmant : les structures de proximité, porteuses de projets, périclitent, alors même que la pauvreté et les inégalités territoriales ne reculent pas.
Face à ce constat, le Réseau National des Centres de Ressources Politique de la Ville rejoint l’appel du Mouvement Associatif : tous·tes mobilisé·es le 11 octobre pour les associations, partout en France.
Sans les associations :
Pas d’égalité dans l’accès au sport, à la culture et à l’expression artistique ;
Pas de soutien à la réussite éducative et à la parentalité ;
Pas de prévention et de lutte contre les discriminations ;
Pas d’accompagnement vers et dans l’emploi ;
Pas d’aide à l’accès aux droits sociaux ;
Pas de liens sociaux ni de solidarité.
Suite à son officialisation le 15 mars 2022 par Nadia Hai, alors ministre déléguée à la ville, le Comité d’Histoire de la Politique de la Ville a vécu deux premières années riches en projets. En lien avec les universitaires, les élu·es, les professionnel·les de la politique de la ville, les associations et les habitant·es des quartiers populaires, le comité a travaillé à mieux connaitre l’histoire de la politique de la ville. Journée d’études, séminaire sur les politiques de jeunesse dans les quartiers, démarches d’histoire locale, programme grands témoins, production d’un guide des sources, participation à des évènements et publications de partenaires : le comité a été très actif !
En 2024-2025, le comité continue sur sa lancée et organise un séminaire sur le thème suivant « politique de la ville, décentralisation, gouvernances locales ».
La politique de la ville se singularise par le fait qu’elle est contemporaine de la décentralisation, un laboratoire de renouvellement des gouvernances, d’ingénieries territoriales et de la contractualisation entre l’État et les collectivités. Le séminaire souhaite explorer tous ces dimensions, en analysant les grandes étapes de la décentralisation en miroir avec les évolutions de la politique de la ville et en remettant en perspective ce mouvement global à l’aune de contextes territoriaux spécifiques.
Vous pouvez retrouver sur le site internet du comité les notes introductives des responsables scientifiques du séminaire : Philippe Estèbe, géographe et directeur d’études à la coopérative de conseil Acadie et Thibault Tellier, professeur d’histoire contemporaine à l’IEP de Rennes.
Le premier rendez-vous de ce cycle aura lieu le 18 décembre 2024 à Paris, au siège de la Caisse des Dépôts et Consignations et portera sur « Le rôle de l’État et des acteurs publics nationaux dans la décentralisation ». Par la suite, les séances suivantes seront décentralisées : à Toulouse en février, à Lyon en mai, à Marseille en juin et en Seine-Saint-Denis en juillet. Chaque séance de ce séminaire sera accessible en présentiel ou en visioconférence. Vous trouverez sur le site internet du comité le programme complet ainsi que le lien pour vous inscrire.
Le Réseau national des centres de ressources politique de la ville est fier d’être un partenaire privilégié du Comité d’Histoire de la Politique de la Ville. Certains de nos centres membres accompagnent cette politique publique depuis plus de 30 ans et nous sommes heureux de contribuer aux missions que le comité s’est vu confiées !